Les aventures de Fricadelle

Fricadelle était d'une humeur massacrante cet après-midi là, sa cousine Hortensia était véritablement une plaie. Elle avait disparu depuis déjà sept jours et son père, Will Piedblanc, venait à peine de se décider à la faire rechercher. Quand Mère Nature s'était penchée sur son berceau elle lui avait accordé un corps de rêve, une beauté légendaire et une grâce digne des elfes.... Malheureusement dans son panier si garni elle avait oublié d'y inclure une once de bon sens! Sa cousine ne savait ni chasser, ni cuisiner. Comment allait-elle faire pour se défendre! Fricadelle doutait qu'un gobelin soit sensible à des œillades, des sourires et des battements de cils, et c'était les seules armes dont était pourvue Hortensia. Cela faisait une bonne vingtaine de minutes que Mémé Picalilly tentait en vain de convaincre Fricadelle de partir retrouver la jeune hobbite insouciante.
La sage grand-mère se dit que c'était le moment d'utiliser les grands moyens, il était grand temps que sa petite fille quitte enfin le nid, et vole de ces propres ailes.
- "Écoute, c'est ton oncle Will qui te le demande. Toi qui rêve d'aventures ma petite, c'est le moment! Tu ne cesse de me rebattre les oreilles à longueur de journée avec les récits que tu entends sur des actes de bravoure et d'héroïsme, il est grand temps que l'on y cite ton nom ma belle! Je sais ce que tu vaux, c'est moi qui t'ai élevé à la mort de tes parents. Tu sais te battre, tu es courageuse, intel..."
- "C'est bon Mémé Picalilly, cesse tes flatteries, j'y vais, tu as gagné!" dit-elle en rougissant.


Suivre la trace d'Hortensia Piedblanc dans la Comté avait été chose aisée jusqu'à Trous des Grisards, et là plus rien, la piste avait cessé. Alors que les recherches se concentraient sur la Comté, Fricadelle avait opté pour l'Evendim. Une intuition la poussait à prendre cette direction.
Elle sut qu'elle avait fait le bon choix à Castelorge en entendant deux jeunes hobbits se disputer au sujet d'une hobbite afin de savoir si celle-ci était plus belle qu'un couché ou un levé de soleil. Après les avoir questionné, elle apprit qu'Hortensia avait rejoint une compagnie d'aventuriers qui se rendait vers Tinnudir. Cela la rassura de la savoir entre de bonne main mais elle pressa le pas, ces contrées n'avaient rien d'accueillant. Le voyage jusqu'à cette place forte ne fut pas un parcours de santé, mais elle parvint tout de même à destination.
Le spectacle qui s'offrit à elle lorsqu'elle arriva sur place fut un réel soulagement. Trois hobbits se livraient une joute verbale afin de déterminer lequel d'entre eux avait accompli le plus haut fait d'arme pour séduire une magnifique hobbite aux boucles blondes qui se trouvait avec eux près du feu. Fricadelle décida de s'immiscer quand la situation commença à s'envenimer, les trois petits aventuriers en venaient aux mains et ils finiraient par s'étriper si personne n'intervenait. Sa cousine quant à elle avait un grand sourire aux lèvres, elle était aux anges de les voir se disputer pour elle.
- "Bonjour Hortensia, tu à l'air de passer du bon temps."
- "Cousine Fricadelle! Mais que fais-tu ici?"
- "Je te retourne la question."
- "Et bien, je m'ennuyais ferme à Grand'Cave, les hobbits y sont sans surprise et assommant alors je suis partie pour me trouver un mari digne d'intérêt, je veux épouser un bel aventurier héroïque!"
Les trois hobbits, qui étaient encore là et écoutaient la conversation avec attention bombèrent tout à coup le torse.
- "Ton père est mort d'inquiétude, il a fait retourner toute la Comté pour te retrouver. Il m'a demandé de venir te chercher pour te ramener," dit Fricadelle en croisant les bras. "Tu es ravissante, tous les hobbits de La Comté doivent vouloir ta main," ragea la jeune hobbite. "Tu n'avait qu'à en parler à Lobélia Saquet de Besace, en deux heures toute la Terre du Milieu aurait été au courant, et les prétendants se seraient rués à la mairie pour réclamer ta main. "
- "Père se fait du souci! Je ne voulais pas lui donner du tracas, c'est pour cela que je lui ai laissé une lettre. Apparemment se n'était pas suffisant, il doit être dans tout ses états le pauvre pour faire cela! Et bien soit, je prépare mes affaires tout de suite et je te suis."
Fricadelle était surprise qu'Hortensia accepte aussi facilement son retour à Grand'Cave. Son aventure lui avait-elle mis un peu de plomb dans la cervelle?
- "Écoute cousine, je te cherche depuis des jours, je suis éreintée et un peu repos me fera du bien. Je vais envoyer un courrier à oncle Will pour le rassurer. Demain, je me rendrais seule à Ost Forod pour remettre une lettre que l'on m'a confié. Tu m'attendras ici jusqu'à mon retour, je vois que tu es en bonne compagnie, et je ne voudrais pas te mettre en danger. A mon retour, nous trouverons des compagnons pour repartir vers Castelorge en toute sécurité."
- "Cela me convient à merveille, ces jeunes aventuriers sont charmants et j'espère qu'ils resteront avec moi jusqu'à ce que tu reviennes."
- "Bien sûr charmante demoiselle, je me ferais un plaisir de pourvoir à votre sécurité..."
- "Et moi je vous préparerais des délicieux petit plats, bien savoureux..."
- "Je vous conterais de fabuleux récits pour vous faire passer le temps," ajouta le dernier.

Fricadelle n'en revenait pas, sa cousine lui avait fossé compagnie. A son retour d'Ost Forod quatre jours plus tard, elle ne l'avait trouvé nulle part. Pas de trace non plus des trois hobbits qui étaient sensés la surveiller. Si elle leur mettait la main dessus, ils allaient passer un très mauvais quart d'heure.
Un homme dénommé Gilles Symes, lui expliqua qu'il avait emmené une jeune et jolie hobbite de l'autre coté du lac en Emyn Uial à Hautecime le jour de son départ. En quelques minutes, Fricadelle l'avait convaincu de lui prêter une barque et de lui montrer la direction qu'elle devait emprunter. La traversée du lac fut très pénible et elle avait dévié de sa trajectoire de sorte qu'elle eut à marcher quelques heures avant d'arriver à destination. Là elle ne prit que le temps d'attraper Hortensia et de la trainer en direction de la barque.
- "Mais lâche moi, tu me fais mal! Je n'ai pas envie de partir, il y a le hobbit de mes rêves en train de dormir dans une des tentes de ce camp."
- "Ça m'est complètement égal, même si je dois t'attacher une corde autour du cou et te trainer jusqu'à la Comté crois moi, je vais le faire," hurla Fricadelle. "Tu es pire qu'un hobbiton, on ne peux pas te laisser sans surveillance. Quatre jours à m'attendre, c'était tout, et il a fallut que tu disparaisse. S'il t'était arrivé malheur, ton père m'aurait tuer bougre d'ânesse!"
- "Restons juste jusqu'à demain..."
- "Il en est hors de question! Tu profiterais de la nuit pour me prendre la poudre d'escampette."
- "Mais et mon hobbit...."
- "Pas de mais, il devra surement passer par Tinnudir et tu le reverras là-bas demain. Maintenant silence, tu vas attirer tous les gauradans du secteur."
Elle durent s'arrêter en chemin pour monter un camp, car la nuit était tombé et elles ne parvenaient pas à retrouver la barque. Fricadelle en profita pour prendre un bain dans le lac et enfin se débarrasser de toute la poussière de son voyage. Elle commençait à regagner le rivage lorsqu'elle entendit les cris horribles d'un animal.
- "Regarde comme il est mignon," dit Hortensia en lui montrant un marcassin qui gigotait entre ses mains pour s'échapper.
- "Lâche ça tout de suite," hurla Fricadelle qui avait de l'eau à hauteur de ses cuisses.
Elle se mit à courir pour sortir du lac. La laie, ainsi que deux sangliers déboulaient déjà des buissons. Elle eut juste le temps d'attraper une chemise et un pantalon au vol et se mit à courir aussi nue qu'au jour de sa naissance en tirant sa cousine par une manche. Celle-ci avait libéré le petit, mais les adultes n'avaient pas abandonné la poursuite pour autant. Elles avaient presque atteint Hautecime quand elles s'arrêtèrent de courir. Fricadelle passa enfin ses vêtements qui étaient sales et déchirés par la faute des ronces et commença à hurler sur Hortensia.
- "Tu es une véritable calamité! Prendre un marcassin, tu croyais que c'était un chiot! Mais enfin, que t'est-il passer par la tête? Es-tu folle ou stupide? Si tu n'étais pas ma cousine je t'aurais déjà abandonné au beau milieu d'un camp de gobelin! Je vais te laisser à Hautecime, et je vais retourner au camp pour essayer de récupérer nos affaires, ta robe est toute déchirée et il me faut mes armes. Je te préviens, si à mon retour tu n'es pas ici, ne compte pas sur moi pour te suivre, je continuerais mon chemin et il pourra t'arriver n'importe quoi, je m'en laverais les mains."
- "Je te promets que je serais là, répondit Hortensia en tremblant de tout ses membres."

Lorsqu'elle arriva à proximité du camp, la nuit était bien avancée, elle se dissimula dans des fourrés pour voir si le camp était bien désert, ce qui était le cas. Elle s'approcha et ne put que constater les dégâts. Les sangliers avaient dévasté toutes leurs affaires, il ne restait rien qui soit en bon état. Des gauradans étaient surement aussi passer par là, car il n'y avait aucune trace de ses armes ou de sa bourse. Avec un peu de chance, Hortensia avait gardé la sienne, cela leur permettrait de pouvoir rentrer à Grand'Cave.
Elle arriva à Hautecime en début de matinée toute fourbue. Hortensia était en grande conversation avec un hobbit. Elle s'approcha d'eux, sa cousine lui lança un bonjour, son compagnon se retourna pour faire de même, il lui fit un grand sourire. Et là Fricadelle sentit son cœur s'emballer, elle avait les jambes en coton et ne parvint pas à trouver ses mots pour les saluer. C'était le plus beau hobbit qu'elle avait croisé de sa vie.
- "Andy il faut y aller," dit un grand Capitaine qui se tenait à proximité sur son cheval.
- "J'arrive," répondit le semi homme, "à bientôt mesdemoiselles," ajouta t-il à leur intention.
- "Au revoir Messire Andrago," dit Hortensia en versant quelques larmes.
Il couru vers son compagnon sauta sur son poney, et ils partirent tous deux au galop.
- "Comment l'as tu nommé?" demanda Fricadelle qui venait de retrouver ses moyens.
- "Et bien Messire Andrago, et le Capitaine était le seigneur Alahir!"
- "Quoi! Saperlipopette, tu sais que ce hobbit est un véritable héros, les récits le concernant ainsi que ses compagnons sont nombreux..."
- "Oui je le sais, j'avais remarqué que Longrameau et le Capitaine lui parlaient avec grand respect, je me doutais que c'était quelqu'un d'important. D'ailleurs c'est lui que je veux épouser, c'est de lui que je te parlais hier."
Fricadelle serra les dents, il fallait à tout pris qu'elle ramène Hortensia à Grand'Cave et qu'elle s'en débarrasse. Elle ne savait pourquoi, mais entendre sa cousine dire qu'elle voulait épouser le Seigneur Andrago l'avait mis dans une rage folle. Elle allait reprendre le contrôle d'elle même quand elle remarqua que la jolie hobbite portait une robe magnifique, ainsi que de beaux bijoux.
- "Où as-tu eu tout ça," dit-elle en désignant les objets.
- "Et bien je les ai acheté à un colporteur ce matin avec mon argent, tout ça m'a couté une véritable fortune. D'ailleurs c'est bien dommage qu'il ne soit plus là, tu aurais eu besoin toi aussi de renouveler ta garde robe. Tiens mais où sont nos affaires?"
Fricadelle lança un regard assassin à Hortensia.
- "Où donc crois tu qu'elles sont triple andouille! La famille de ton adorable animal de compagnie d'hier les a saccagé et des gauradans ont volé le reste et ma bourse avec. J'espère qu'il te reste assez d'argent pour notre voyage de retour!"
- "Euh...je...suis...désolée...bredouilla la belle blonde, en fait...la robe...les bijoux...enfin tu comprends."
- "Tu as tout dépensé, hurla Fricadelle, mais comment va-t-on faire? Ma vie est devenue un véritable enfer depuis que je t'ai retrouvé! Je vais faire un tour, sinon je vais finir par t'étrangler."
Elle ramassa quelques cailloux et se mit à les lancer jusqu'à ce qu'elle ai retrouvé son calme. Puis la rage fit place au désespoir lorsqu'elle vit son visage dans l'eau. Elle comprenait à présent pourquoi Messire Andrago avait sourit à sa vue à présent, elle avait les cheveux emmêlés et sales, le visage couvert de boue et de poussière, et ses vêtements n'étaient que des loques. Elle ne pouvait tenir la comparaison avec sa cousine, déjà en temps normal elle l'éclipsait largement mais là, elle ressemblait à une souillon à coté d'elle. Elle s'assit au bord du lac et se mit à pleurer à chaudes larmes.

De nombreux jours s'étaient écoulés, et les deux cousines se trouvaient encore à Hautecime. Pas l'ombre d'une personne n'était passée par là, et elles étaient dans une bien piètre situation. Impossible de se rendre à la barque sans arme, et rentrer jusqu'à Tinnudir à la nage était impensable puisqu'elles ne savaient ni l'une, ni l'autre nager. Fricadelle avait commencé à apprendre, mais de là à traverser une telle distance sans se noyer!
Erchiel, Lithuifin, deux elfes ainsi que Longrameau étaient leurs seuls compagnons. Ils leur avaient fourni gracieusement des couvertures et de la nourriture. L'elfe chasseuse avait bien proposé de leur donner un arc, seule arme qu'elle sache fabriquer mais elles ne savaient s'en servir. Elles s'étaient donc résolues d'attendre que quelqu'un passe par là pour lui remettre une lettre pour l'oncle Will afin que celui-ci leur fasse parvenir de l'argent.
Fricadelle avait beaucoup appris auprès des trois habitants du camp, ils étaient une véritable mine d'informations. Quant à Hortensia, elle avait agréablement surpris sa cousine. En effet, elle s'évertuait à être bien moins frivole et s'appliquait à se cultiver. Elle apprenait à pécher, cuisiner, et même à se servir d'un lance-pierre. Finalement cette aventure lui serait profitable.
Par un bel après-midi, alors que Fricadelle s'entretenait avec Lithuifin pour la millième fois au sujet du beau maître ménestrel Andrago, une dame elfe fit irruption dans la tente.
- "Mae govannen," dit-elle en entrant, "je n'ai pu m'empêcher de vous interrompre en entendant votre conversation, son sujet m'intéressant vivement. Que me vaut le plaisir d'entendre le prénom d'Andrago en ce lieu?"
- "Bonjour Dame elfe," répondit Fricadelle en s'inclinant, "en fait, je l'ai rencontré il y a plusieurs jours ici même..."
- "Je suppose qu'il était en présence d'un Capitaine nommé Alahir."
- "Comment le savez-vous ma Dame?" demanda Fricadelle en ouvrant des yeux ronds comme des soucoupes.
- "Et bien, Alahir est mon tendre époux, quant à mon petit Andy, c'est un de mes plus chers amis, on peut même dire qu'il fait parti de la famille."
- "Vous êtes Dame Ienor!" s'exclama la hobbite.
- "Oui, comment le savez-vous? Andy vous à parler de moi?"
- "Euh, non on ne peut pas vraiment dire ça. En fait, à part un bonjour nous n'avons rien échangé d'autre," murmura à regret Fricadelle en rougissant. "Je vous connais par les récits que j'ai entendu sur votre compagnie, Andrago le valeureux et brillant ménestrel, Alahir le grand et brave capitaine, Ethorn le courageux champion débonnaire, Rohssan le vaillant nain râleur, la fière et intrépide Eléora, Wengweng l'espiègle cambrioleur séducteur, Ludina autant connu par ses frasques dues à l'alcool que par ses prouesses au combat...inutile que je continue à tous les citer, vous les connaissez tous surement bien Dame Ienor!"
- "Je ne pensais pas que l'on avait une aussi haute opinion de mes compagnons et de moi-même. Nos aventures ont du être en grande partie romancées et exagérées je suppose. Si vous voulez vous faire une réelle idée de qui nous sommes, accompagnez moi donc, je dois rejoindre Alahir, Andy et peut être aussi Ethorn. Qu'en pensez vous Mademoiselle...?"
- "Fricadelle Picalilly de Grand'Cave," dit-elle d'un trait. "Ce n'est pas une plaisanterie ma Dame, je peux venir avec vous? Vous allez vraiment me présenter le Seigneur Andrago?"
A ce nom, la hobbite rougit comme une écrevisse.
- "Oui, bien sûr. Je pense qu'il sera ravie de connaître un peu mieux une si charmante demoiselle qui lui porte autant d'intérêts."
- "Oh non," soupira Fricadelle, "je ne pourrais pas venir."
Elle se mit à sangloter, ne parvenant plus à s'arrêter. Ienor s'approcha, lui tendit un mouchoir et se mit à sa hauteur.
- "Allons, que vous arrive t-il? Je suis sure que je peux arranger cela si vous me l'expliquez."
- "Je dois ramener ma cousine à Grand'Cave, et puis je n'ai plus un sous, ni d'arme, ni même autre chose à me mettre que les loques que j'ai sur le dos."
- "C'est bien ce que je pensais, rien que je ne puisse régler. Pour aller à Bree, nous passeront par la Comté, et nous ferons un petit détour par Grand'Cave. Pour les armes je connais quelques personnes qui vous en fabriqueront. Les vêtements, un vrai jeu d'enfant : je suis tailleuse. Et puis l'argent, j'en ai suffisamment pour faire vivre trois personnes pendant des lustres. Alors affaire conclue?"

Le voyage vers Grand'Cave était très agréable, Ienor s'employait tous les soirs à entrainer Fricadelle qui faisait de grands progrès. La hobbite ne cessait de questionner l'elfe sur ses aventures et surtout sur le ménestrel. Elles étaient presque parvenues à destination quand Hortensia décida qu'il était temps de taquiner la petite sentinelle.
- "Cousine, je crois que finalement je vais épouser un bel hobbit de La Comté qui ne soit pas féru de voyages. Le seigneur Andrago n'est vraiment pas fait pour moi, je ne souhaite pas devenir une jeune veuve. Et puis je connais une jolie hobbite qui lui conviendrait bien mieux que moi."
- "Ah bon, et qui ça?" demanda Fricadelle déjà sur des charbons ardents.
- "Tu la connais ma chère, et si je ne m'abuse, je pense qu'elle est raide dingue amoureuse de lui."
- "Mais qui est-ce? Réponds moi cousine Hortensia!"
- "Tu ne vois vraiment pas? Je parle de la jeune hobbite qui chevauche à mes cotés."
Le visage de Fricadelle devint cramoisi, puis elle secoua la tête. Ienor ne put s'empêcher de pouffer.
- "Si tu parle de moi, tu te trompe! Je n'ai jamais été amoureuse de toute ma vie! Et je ne le suis absolument pas. Je ne le connais même pas et je ne l'ai croisé qu'une fois."
- "Si tu n'as jamais été amoureuse comment peux-tu être sure de ne pas l'être! Quoi qu'il arrive ça saute aux yeux. Tu ne cesse de parler de lui, de poser des questions sur sa personne et tu rougit dès que l'on cite son nom. Et dès que je t'ai dit que je connaissait une hobbite digne de lui, on aurait pu briser des cailloux entre tes dents."
- "Cesse donc de dire des sottises," bredouilla Fricadelle puis elle changea de discussion. "Regardez, nous arrivons à Grand'Cave."

Mémé Picalilly avait été fière de recevoir une elfe dans sa modeste demeure. Elle était enchantée que sa petite fille reprenne la route en si noble compagnie et surtout que Fricadelle fut devenue amie avec Ienor. Après une journée et une nuit passée sur place, les deux compagnes quittèrent Grand'Cave en direction de Bree.
Le voyage ne fut pas long, Ienor étant pressée de retrouver son Alahir. Lorsqu'elles arrivèrent à l'auberge du Poney Fringant, Fricadelle était terriblement nerveuse.
- "Ienor, cela ne te dérange pas d'entrer sans moi, j'aimerais m'occuper des chevaux avant d'entrer dans l'auberge."
- "Je suppose aussi que tu aimerais être à ton avantage avant de voir l'élu de ton cœur," lui répondit l'elfe avec un clin d'œil. "Ne te tracasse pas, je ne lui dirais rien," sourit-elle, "de toute façon, il s'en rendra compte tout seul, comme l'a dit ta cousine : ça saute aux yeux!"
Fricadelle n'avait pas eu le temps de dire quoi que se soit, sa compagne de route avait sauté de son cheval et se précipitait en courant presque vers la porte du Poney Fringant. Elle soupira, et se demanda ce que le beau hobbit allait penser d'elle. Elle ne mit que quelques minutes pour se changer et se débarrasser de la poussière du voyage. Elle essayait de retrouver son calme en s'occupant de Maeglin, l'étalon de Ienor quand elle entendit une jolie voix reconnaissable entre toute lui demandait :
- "Bonjour Mademoiselle, on ne se serait pas déjà croisé quelques part du coté de Hautecime?"

L’air était doux ce matin et le soleil vint frapper le visage des deux hobbits arborant un large sourire. Le rythme de la ville de Bree battait son plein et ils regardèrent un instant les passants tantôt pressés tantôt flânant. Le spectacle des deux hobbits se tenant la main attendrirent ou firent sourire certains mais Andrago et Fricadelle ne s’en occupèrent guère. Rien n’avait été plus beau que ce jour-là. Andrago se retourna vers Fricadelle et lui adressa son sourire qui l’avait fait craquée la première fois qu’ils s’étaient rencontrés à Hautecime : « Viens ma Belle. Je suppose que tu dois mourir de faim. Je vais t’offrir un repas digne d’une hobbite aussi jolie que toi. Mais avant je vais te faire couler un bon bain pour te détendre de ce long voyage. Je suis bien placé pour savoir qu’un bain est bienvenu en ces circonstances ! »

Fricadelle, telle une pivoine, se laissa tirée par la main et se dit que si elle n’avait pas été bien élevée, elle aurait préféré dévorer tout de suite ce doux hobbit plein d’attention : « Merci Andrago, oui je meurs de faim effectivement. Mais je ne mérite pas tant d’attention…
- Oh Fricadelle, ma belle, je t’invite et tu n’as qu’à te laisser faire ! répliqua Andrago avec un sourire qui fit fondre Fricadelle.
- Dans ce cas, emmène-moi où bon te semble, je te suivrai jusqu’au bout du monde.
Andrago s’arrêta net à ces mots, étrangement touché par les mots de Fricadelle. Il la regarda, troublé, et Fricadelle l’interrogea du regard, il paraissait vouloir dire quelque chose. Il ouvrit la bouche : « Fricadelle, tu sais où je vais aller n’est pas vraiment la place pour la fragilité que je perçois encore en toi. Mais je sais que prochainement, tu pourras venir avec moi car tu es comme moi, fait dans le même moule, le même goût de l’aventure et des exploits. » La main d’Andrago serra celle de Fricadelle : « Viens ma Belle, pour l’instant suis-moi jusque ma chambre au Poney Fringuant! »

Andrago l’emmena dans une petite chambre adaptée aux hobbits. Quelques minutes plus tard, il avait versé de l’eau chaude dans une baignoire sous les yeux attendris de Fricadelle. « Je vais prendre congé et te laissait te mettre à ton aise. Prend tout ton temps, fais-toi plus jolie que tu ne l’es déjà. » Il lui fit un clin d’œil et s’éclipsa avant qu’elle ne puit dire mot.

Elle ne put s’empêcher de pousser un cri de joie, tourna sur elle-même et se laissa tomber dans le lit moelleux au même moment ou elle s’aperçut qu’Andrago était revenu. Elle devint plus rouge que jamais et Andrago lui dit : « Euh je t’ai laissé des serviettes propres à côté de la baignoire… A tout à l’heure, petit coquelicot… »

Elle se glissa derrière le paravent, se déshabilla et entra doucement dans l’eau légèrement parfumée. Cela la détendit immédiatement et elle ne tarda pas à s’endormir, ses pensées vagabondèrent dans la douceur et la chaleur des bras d’Andrago.

Elle se réveilla en sursaut, elle ne savait pas combien de temps elle avait dormi mais l’eau était tiède presque froide. Elle sortit de l’eau se sécha avec les serviettes qu’Andrago avait laissées. Elles étaient si douces… Mais elle répugna l’idée de remettre ses vêtements sales, c’est alors qu’elle découvrit sur le lit un paquet. Une feuille de papier était posée dessus et Fricadelle se précipita pour lire le message qui y était écrit :

« Ma Belle Fricadelle,

Vu l’état de tes vêtements, je me suis permis de t’offrir cette modeste robe. Tu te sentiras plus à ton aise je suppose. Je t’attends en bas dans l’auberge. Nous déjeunerons avec nos amis.

Andy »
Elle ouvrit le couvercle du paquet et une robe blanche s’y trouver. Elle l’enfila, se coiffa et descendit dans la grande salle toute pimpante.

L’entrée de Fricadelle fut remarquée. Certains des hobbits présents s’arrêtèrent de discuter et de manger, mais un seul retenait l’attention de la belle hobbite. Andrago restait bouche bée devant elle. Alahir qui se tenait à côté tapota fermement le menton du hobbit pour lui fermer sa bouche. Ienor riait.

Fricadelle arrivant à table, Andrago se leva et lui présenta la chaise de façon solennelle sous les rires étouffés des deux compagnons. Fricadelle remercia Andrago d’un sourire qui fit fondre le hobbit si courageux soit-il. Et tous commencèrent à manger et à discuter de l’état actuel des choses, les évènements récents. Fricadelle écoutait des faits qui la dépassaient mais le sérieux d’Andrago lui faisait éviter de poser trop de questions.

« Il nous faut y aller coûte que coûte à cette Moria ! Nous avons fait notre devoir ici et les nouvelles recrues font du bon travail en Eriador. Notre route se poursuit en Rhovanion, mes amis, dit Andrago
- Oui en effet, répliqua Alahir. Même si les mines ne m’enthousiasment guère, j’ai entendu dire qu’il y règne un mal beaucoup plus grand que dans ces terres.
- Et même moi, je ne pourrai t’empêcher d’y aller, bouda Ienor. Cependant, je vous suivrai tous les deux, malgré que je serai fréquemment absente pour des raisons diverses.
- En effet, je dois venir en aide au reste de l’Alliance et Andy viendra avec moi comme il me l’a proposé. Nous partirons la semaine prochaine. »

Fricadelle se sentit bien inutile d’un coup et Andrago qui ne cessait de la regarder se rendit compte que quelque chose clochait.

« Ma belle Fricadelle, tu ne dis plus un mot depuis un moment et tes yeux semblent tristes. Que t’arrive-t-il ? lui dit-il en posant la main sur la hobbite.
- Il y a que je vous verrai partir la semaine prochaine dans d’autres contrées et vous parlez de choses que je ne connais guère. Toi Andy tu partiras loin de moi et je sais que le manque sera fort. Si je pouvais me faire toute petit pour m’introduire dans ta poche…
- C’est trop dangereux pour toi et je m’en voudrai tellement s’il t’arrivait quoi que ce soit dans le cas où je t’emmènerai là où nous allons… Et tu auras tellement de chose à faire ici. Le fait de partir loin d’ici te donne la responsabilité de protéger l’Eriador et ce n’est franchement pas chose aisée. Le fait que tu veuilles entrer dans ma poche me rassurerait mais je ne te sortirais seulement que tout danger soit écarté pour te garder intacte. Mais le danger est présent constamment là-bas. »

Fricadelle ne pût qu’admettre qu’Andrago avait encore raison. Elle protègera l’Eriador de toute son âme mais non de tout son cœur car Andrago y avait pris toute la place.

Andrago aspira une grande bouffée d’air intact. Cela lui soulagea le mal de gorge qu’il avait depuis la vieille. Sa respiration sifflait un peu et se retournant il regarda la porte d’où il sortait. Cette porte qu’il avait empruntée, il y a quelques mois, faite de pierre et d’Ithildin était grande ouverte et un air renfermé y émanait faisant reculer le hobbit de quelques pas, écœuré.

Il se retourna et regarda la région vallonnée de l’Eregion, bien au-delà du lac à ses pieds. Il allait pleuvoir et il décida de rester déjeuner ici avant que la pluie n’inonde son repas. Pendant qu’il mâchouillait machinalement un quignon de pain, son visage était tourné vers l’Ouest, l’Eriador. Quelque part dans cette région se trouvait sa belle hobbite. Elle lui manquait terriblement et pas un jour il ne pensa pas à Fricadelle, moment de rêveries. C’est sa force, son courage. Certes il a de très grands amis, sur lesquels il peut compter et son cercle de connaissance s’agrandit, mais c’est vers Fricadelle que son cœur s’attarde.

Il y a quelques jours, en compagnie d’Alahir et certains membres actifs et très courageux de l’Alliance, il terrassa le terrible orque s’étant proclamé Seigneur des Forges de Khazad-Dûm dans les Mines de la Moria. Il était fier d’appartenir à un groupe aussi efficace. L’expérience des combats, des quêtes et des prouesses a fait que la plupart des aventuriers sont devenus puissants, renommés et on entend maintenant parler des Compagnons de Route et de la Légion de Mahal. Une organisation sans faille s’installe dans le groupe pendant les combats, chacun ayant son rôle influant sur les autres membres et sur la communauté entière.

Cependant, la répétition des combats, la dureté des coups et la fatigue se faisait ressentir chez le hobbit. Notamment, un très vilain coup d’un guerrier Gash-Hai dans le flanc d’Andrago lui brisa quelques côtes et sa respiration depuis se faisait difficile. Et puis cet air dans les mines ! Un air vicié qui n’arrangeait rien aux choses. Il rêvait à rejoindre la Comté afin de se ressourcer un peu, se reposer. Il décida, après une mauvaise nuit, de partir des Mines. Alahir savait qu’Andrago n’allait pas très bien et souvent il s’inquiétait de son état de santé. Les ménestrels sont la chair à saucisse préférée des orques de la Moria, et l’odeur de muffin que dégage Andrago attire irrémédiablement les Grodbogs. Alors il ne put qu’accepter que son ami doive se retirer quelques jours.

Il finit de manger quand la pluie commença à tomber. Il s’empressa de remonter sur Mehara, son nouveau poney et il s’engagea dans le chemin contournant le lac pour rejoindre Echad Dunan. Sur la route, il savourait la pluie lui tombant sur le visage, sensation qu’il faillit oublier à force de traîner sous terre. Il se demanda où pouvait bien être sa promise. Il commencera à enquêter à Bree la dernière fois où elle était à ses côtés et qu’elle veillait tout le temps à ce qu’il ne manque de rien. Un tendre sourire apparût sur le visage d’Andrago et il en oublia les douleurs costales.

Après un voyage sans encombre, à son étonnement, Andrago arriva à Bree. Mais il fut déçu quand il apprit qu’on n’avait pas vu Dame Fricadelle depuis quelques semaines mais qu’elle était partie chercher aventure du côté des Terres Solitaires. Son moral baissa grandement. Dans quel pétrin pouvait-elle se fourvoyer là-bas et puis c’est tellement grand ces terres. « Demain ! Direction l’auberge abandonnée ! » Et il songea à emmener sa petite Fricadelle loin d’ici dans un petit trou de hobbit à Castelbois, à boire du thé et manger une quantité extraordinaire de muffins à la myrtille comme elle sait si bien faire.

« Fricadelle ! Où peux-tu être ?! »